YANGBEN
EN QUETE DU DEVELOPPEMENT DURABLE
Village situé dans le Département du Mbam et Inoubou dans la Région du Centre Cameroun (Afrique Centrale), Yangben a une population d’environ 6000 habitants dont la moitié a moins de 15 ans. Il se trouve à près de 175km de Yaoundé la capitale dans l’arrondissement de Bokito dont il dépend. Les langues parlées sont le nuasuε, le français et l’anglais.Yangben jouit d’un climat tropical très contrasté de tonalité sèche et très agressif, caractéristique du Mbam et Inoubou. Son couvert végétal particulier est constitué de forêts et de savanes d’étendues variées qui s’imbriquent mutuellement.
On distingue aux abords des cours d’eau, des forêts-galeries riches en essences précieuses et rares (ébène, bubinga, doussié…). La végétation est menacée par les exploitations humaines et par les feux de brousse qui favorisent l’auto-entretien du processus de savanisation.
ACTIVITES ECONOMIQUES
Les populations vivent essentiellement de l’agriculture, pratiquée en forêt pour les cultures de rente notamment le cacao, associées à certaines cultures vivrières telles que la banane plantain, le taro, le manioc, le macabo, etc. La savane produit une bonne partie des cultures vivrières consommées sur place ou vendues localement. Les effets du changement climatique se font de plus en plus ressentir avec la réduction du taux des précipitations, la perturbation des saisons, la réduction de la superficie des forêts et l’appauvrissement des sols.
Toutefois, les populations de Yangben, très laborieuses, ont su mettre en valeur le milieu naturel grâce à une bonne adaptation aux conditions écologiques. Le large éventail des plantes cultivées ainsi que l’alternance saisonnière des cultures traduisent les efforts constants que ces populations fournissent afin de tirer d’un sol parfois ingrat, le maximum alimentaire nécessaire à la survie de la région.
S’agissant des activités pastorales, il y a lieu de noter que l’élevage du petit bétail est de type familial. L’élevage bovin, quant à lui, est assuré par les Bororos venus du Nord du pays, ce qui n’est pas sans occasionner quelques conflits avec les populations autochtones.
Quant à l’artisanat local, il est davantage orienté vers la fabrication d’objets utilitaires notamment des lits en bambou, des paniers et des gibecières tressés, des instruments de musique, dont il dépend. Les langues parlées sont le nuasuε, le français et l’anglais.
Les infrastructures (routières, sanitaires, scolaires) sont insuffisantes ou de mauvaise qualité. Cependant, Yangben vient d’être doté d’un poste de gendarmerie qui est fonctionnel. Les routes non bitumées et les pistes rurales sont en mauvais état, surtout pendant la saison pluvieuse, ce qui ne facilite pas la mobilité humaine et les échanges économiques.
SITUATION SANITAIRE
La situation de Yangben ne diffère pas de l’environnement global du pays, particulièrement du contexte des zones rurales. En effet, d’après l’OMS, il y a un médecin pour 10 400 habitants au Cameroun. Selon le Rapport mondial sur le développement humain 2015, le pays occupe le 153è rang sur les 188 classés avec un indice de développement humain (IDH) à 0,512, et un PIB par habitant de 2400 USD en 2014. Ceci explique pourquoi le village Yangben ne dispose que d’un infirmier dans son centre de santé intégré. A côté de celui-ci, il existe un dispensaire catholique tenu par des soeurs religieuses.
Bien que de réels efforts soient déployés depuis quelques années par les autorités pour une répartition plus équitable de l’accès aux soins, ces actions restent insuffisantes.
A Yangben, les principales causes de décès sont les maladies infectieuses, essentiellement le paludisme et la malnutrition. Le paludisme constitue la première cause de morbidité et de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans et les femmes enceintes en particulier. La malnutrition augmente régulièrement d’année en année et affecte la santé des enfants de moins de 5 ans et des femmes.
Les populations, très pauvres, éprouvent des difficultés d’accès aux soins à cause de leur coût élevé et de l’inaccessibilité géographique des structures de consultation moderne, localisées généralement dans les grands centres urbains.
L’impact des maladies transmissibles demeure important. Les maladies à potentiel épidémique (méningite cérébrospinale à méningocoque, fièvre jaune, rougeole) en rajoutent de temps à autre à la morbidité et à la mortalité des populations. Les maladies tropicales négligées, permanentes dans la population (trypanosomiase, onchocercose, filariose lymphatique, etc.) bénéficient d’une plus grande attention de la part des intervenants en santé publique.
Les maladies non transmissibles et les traumatismes sont en recrudescence. Ce sont principalement l’hypertension artérielle, le diabète, la cécité, les cancers, les maladies bucco dentaires, les maladies mentales et les accidents de la voie publique.
FAIBLE ACCES A L’EAU POTABLE
L’accès à de l’eau potable est un luxe à Yangben. La très grande majorité de la population n’y a pas encore accès.
Dans cette localité, seuls 2 des 5 forages susceptibles d’offrir une eau de qualité fonctionnent. Les gens se lèvent à 3 heures du matin ou viennent tard dans la nuit y chercher de l’eau.
En journée, la demande est telle que le point d’eau ne tarde pas à tarir.
Face à cette pénurie, les populations se rabattent sur les cours d’eau dont le liquide est impropre à la consommation.
Les difficultés d’accès à l’eau potable cachent bien d’autres problèmes d’ordre sanitaire tels que les maladies hydriques qu’elles entrainent.
EDUCATION ET ALPHABETISATION
L’intérêt pour les questions d’éducation à Yangben est particulièrement axé sur l’éducation de base pour tous les enfants d’âge scolaire et sur l’alphabétisation des adultes.
En ce qui concerne la scolarisation, le village est doté de deux écoles primaires et d’un lycée. Le niveau des indicateurs met en évidence la difficulté d’assurer à tous les enfants d’âge scolaire un enseignement de base, du fait notamment de la faiblesse des infrastructures et de la pauvreté des parents. Une forte proportion de la population est sans niveau d’instruction.
Au niveau de l’alphabétisation de la population, le taux d’alphabétisation des personnes âgées de 15 ans et plus est faible ; une grande frange de cette population ne sait ni lire, ni écrire en français et/ou en anglais.
La pauvreté, le travail des enfants, la discrimination sexuelle, le Vih/Sida, ainsi que les handicaps physiques et mentaux constituent les principaux obstacles à la réduction de l’analphabétisme.
LUEURS D’ESPOIR
Pour mobiliser toutes les forces vives, les populations ont mis en place une organisation de développement (Comité de développement du village Yangben, en abrégé CODEVY). Parmi les réalisations de cette structure, on note la construction d’un foyer, lieu de rencontre, d’échange et d’éducation entre les populations et les élites pour débattre des problématiques du développement local.
Par ailleurs, la collaboration entre l’ONG dénommée Société Internationale de Linguistique (SIL) et certains ressortissants du canton a permis la conception d’un alphabet en nuasuε. L’existence de cet alphabet, qui est enseigné dans plusieurs écoles du canton Yangben, a rendu possible la traduction en nuasuε du Nouveau Testament de la Bible.
En outre, Yangben entend bien profiter de l’initiative des communes du Département du Mbam-Et-Inoubou qui se sont regroupées au sein d’un Syndicat (SYCOMI) pour mutualiser leurs moyens et dégager des ressources dédiées aux investissements et à la gestion collective des infrastructures d’accès à l’eau potable.
Les attentes des populations du village restent nombreuses et consistent, entre autres, en :
- La mise en place d’une radio communautaire en vue d’accélérer l’éducation et l’alphabétisation en français et en langue locale ;
- L’organisation des filières de formation dans les métiers ruraux, gage d’une autonomisation réelle des populations des deux sexes ;
- La construction de forages pour améliorer l’accès à l’eau potable ;
- La mise en place de mutuelles de santé ;
- L’extension de l’électrification rurale, notamment par le recours à l’énergie solaire ;
- La valorisation du patrimoine culturel et des technologies locales ;
Le développement de la coopération décentralisée pouvant aboutir au jumelage de Yangben avec une localité étrangère.
Joseph NDIOMO